Alerte Info - Acquisition des congés payés pendant un arrêt maladie ou AT/MP - Cour de cassation
Cass. soc. 13 septembre 2023, n° 22-17340
FPBR et cass. soc. 13 septembre 2023, n° 22-17738 FPBR
Le 13 septembre 2023, la Cour de cassation a prononcée
deux décisions historiques, mettant ainsi en conformité le droit français avec
le droit européen en matière de congés payés.
Ces décisions s’appliquent désormais à l’ensemble
des salariés concernés :
Le salarié peut prétendre à l’intégralité
des droits à congés payés.
Résumé des faits :
Le Code du travail français ne prévoit pas l’acquisition de droit à congés payés pendant les absences pour maladie professionnelle. Ces absences ne sont pas assimilées à du travail effectif pour l’acquisition des congés payés.
Mais, la directive européenne sur le temps de travail
de 2003 (dir. 2003/88/CE du 4 novembre 2003, art. 7) prévoit, elle, un
droit à congés payés d’au moins 4 semaines, sans distinguer l’origine des
absences et donc y compris en cas d’arrêt de travail pour maladie non
professionnelle.
Pour les arrêts de travail liés à un accident du travail ou maladie professionnelle lorsqu’ils dépassent une certaine durée, le code du travail les assimile à du travail effectif pour l’acquisition des congés payés, mais uniquement pendant une durée d’un an. Si un arrêt de travail AT/MP se prolonge, le salarié n’acquiert plus de droits à congés payés au-delà d’un an, ce qui est contraire à la directive, puisqu’elle ne prévoit pas cette limite d’un an.
Ainsi, le code du travail français n’est pas en conformité avec cette directive européenne. Jusqu’à présent, la jurisprudence avait dégagé des solutions qui faisaient échapper la majorité des employeurs du secteur privé à cette disposition européenne, en dépit de la pression de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne.
C’est désormais terminé.
Les salariés acquièrent donc des droits à congés
payés pendant leurs arrêts de travail pour maladie non
professionnelle (cass. soc. 13 septembre 2023, n° 22-17340 FPBR).
En matière d’accident du travail et
de maladie professionnelle, sur la base du même raisonnement, la Cour a
décidé d’écarter l’application de l’article L. 3141-5, 5° du code du travail
limitant à un an l’assimilation des arrêts de travail AT/MP à du temps de
travail effectif pour l’acquisition des congés payés.
Autrement dit, l’acquisition des droits à congés
payés vaut pour toute la durée de l’arrêt de travail et n’est plus limitée
à la première année (cass. soc. 13 septembre 2023, n° 22-17638 FPBR).
Le salarié peut prétendre à l’intégralité des
droits à congés payés, sans faire de distinction entre les 4 semaines minimales
garanties par la directive de 2003 et les droits issus de dispositions purement
nationales, telles que la 5e semaine légale de congés payés et les congés
payés d’origine conventionnelle.
Depuis 10 ans, la Cour de cassation pointe dans ses rapports annuels l’absence de mise en conformité entre le code du travail français et la directive européenne de 2003. A maintes reprises, elle a suggérée aux pouvoirs publics de fixer clairement les règles applicables.
Sans succès, y compris dans la loi d’adaptation au
droit européen du 9 mars 2023, qui avait soigneusement évité le sujet,
obligeant la jurisprudence à pallier cette carence et à apporter des solutions.
Le ministère du travail a indiqué prendre acte des
arrêts du 13 septembre 2023 et analyser les options possibles.
En attendant, ces deux arrêts s’imposent à
l’employeur.